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«Nous avons un film que les gens se battent pour voir, mais que personne ne veut diffuser»

Dernière mise à jour : 8 avr.

Daniel Künzi est un réalisateur suisse plusieurs fois récompensé à l’international, qui n’a plus grand-chose à prouver. Mais son dernier film, Covid: Totalitarisme helvétique?! lui a valu d’être mis au ban de sa profession, comme tous ceux qui ont osé s’exprimer pour dénoncer l’absurdité des mesures sanitaires. Malgré l’intérêt continu du public – assez inédit pour un film suisse –, le réalisateur a toutes les peines du monde à trouver des cinémas qui veulent bien projeter son film. Entretien sans langue de bois avec une personnalité flamboyante, catastrophée par la censure qui entoure un sujet qui touche pourtant tout le monde.

Daniel Künzi
© A.D

Amèle Debey, pour L’Impertinent: A quel moment vous êtes-vous dit que quelque chose clochait dans la gestion de la crise Covid?

 

Daniel Künzi: C'était en 2020, alors que j’enseignais quelques heures au Cycle d’orientation de Genève.

 

Je suis tout de même un peu rationaliste – j’ai été formé à l'étude de l'électronique – et je surveillais les statistiques de l’Office fédéral de la statistique (OFS), chaque semaine. Je voyais bien que ce n’était pas l'apocalypse qui nous tombait dessus. J'avais quand même quelques indices qui m'indiquaient que les personnes qui payaient le tribut de cette épidémie étaient très âgées et très malades.

 

En contraste, j'avais des élèves absolument terrorisés derrière leur masque, qui se prêtaient avec empressement au jeu du gel hydroalcoolique. Comme je n'osais plus enseigner la matière qui m'était attribuée, à savoir les activités créatrices, je leur expliquais comment évoluent les épidémies dans l'histoire, les fameuses courbes gaussiennes, etc. Et je leur indiquais le nombre de personnes mortes et le nombre de personnes testées positives.


«Il était de mon devoir de sortir ma caméra et d’aller chercher des personnes victimes de répression»

 

Fin 2020, je vois dans les statistiques qu’il y a eu trois mineurs morts du Covid au cours de l’année, sans que l’on ait leur statut médical, ni que l’on sache s’ils sont morts du ou avec le Covid. J’ai donc demandé à mes élèves à combien ils estimaient les jeunes morts du Covid cette année? En général, on me répondait «des milliers». L’année d’après, au moment de la deuxième vague, les statistiques de l’OFS établissaient le fait qu’il n’y avait eu aucun mineur mort du Covid.

 

Cela, mis en perspective par rapport à une peur terrible, par rapport à des amendes infligées à des personnes qui n'avaient pas leur masque, qui refusaient le pass sanitaire, je me suis dit qu’il y avait quand même quelque chose à en dire. Je pensais prendre ma retraite en tant que cinéaste, mais je me suis dit que l'occasion était quand même trop belle, et que puisque personne ne s’occupait de montrer cette peur paralysante et les mesures coercitives qui ont été prises, il était de mon devoir de sortir ma caméra et d’aller chercher des personnes victimes de répression.

 

Pourquoi n’osiez-vous plus enseigner les activités créatrices?

 

Il faut demander ça au Département de l'instruction publique! J'enseignais les disciplines créatrices, a fortiori en demi classe, donc à des groupes de six à douze. Il n'y avait aucune raison médicale à cela, il fallait simplement accepter les ordres de Berset, qui se manifestaient concrètement dans ma classe.

 

Il n’y a jamais eu de discussion pour nous expliquer en quoi les élèves étaient dangereux pour nous. À ma connaissance, aucun enseignant à Genève, ni peut-être même dans tout le pays, n’est mort du Covid!

 

Mais selon Antoine Flahaut, l'épidémiologiste plus connu pour ses apparitions sur les plateaux télé que pour ses recherches scientifiques: c'est une épidémie terrible, les enfants aussi sont menaçants, il faut ouvrir les fenêtres pour aérer – ce que je fais toujours parce qu'on utilise des solvants. Cela me paraissait absolument ubuesque! Je n’ai jamais compris pourquoi il y avait des couloirs tracés dans l'école, il fallait circuler dans un sens sans se croiser dans l'autre, etc. Alors que, très rapidement, on a vu, pour reprendre la formule de Jacques Pilet, que ni les enfants, ni les profs ne tombaient comme des mouches.

 
 

Un beau matin, je suis convoqué d'urgence par le directeur de l’école. Il me présente une lettre d'un parent d'élève qui m'accuse d’être complotiste et antivax sur une page et demie. J'ai expliqué à mon cher directeur que je n'avais aucune compétence en matière de médecine, et encore moins en matière d'épidémiologie. Tout ce que je pouvais raconter à mes élèves, ce sont les statistiques de l'Office fédéral de la santé publique et rien de plus. Et ça s'est arrêté là. Mais ce fut une tempête dans un verre d'eau. Le directeur a pris très, très au sérieux cette «affaire».

 

J’ai également partagé avec ce directeur les statistiques de l’OFS expliquant qu’il n’y avait pas eu de mort dans la tranche des 0 à 20 ans en 2021. Il n’a pas voulu me croire, comme si c’était moi qui faisais ces statistiques pendant la nuit! En sortant du bureau, je lui ai envoyé le document, lui suggérant de diffuser ces statistiques à tous les profs pour qu'ils en parlent aux élèves. Je n’ai jamais eu de réponse.

 

C’est quand même un comble! Que dans un bâtiment d'instruction publique, le directeur soit non seulement dans l'ignorance mais en plus refuse de transmettre des statistiques officielles.

 

Enseignez-vous toujours dans cette école?

 

J'ai eu soixante-cinq ans l'année passée, donc je suis au bénéfice de ma retraite.

Du moins je pensais l’être quand ce film m’est tombé sur les bras.

 

Comment est née l’idée de ce film d’ailleurs?

 

Ma voisine, lors d’une de ses balades le long de l’Arve durant le confinement, s’est retrouvée en France, où elle a écopé de plusieurs centaines d’euros d’amende. Autour de moi, pas mal de gens se sont retrouvés dans le même cas, pour une histoire de port du masque ou de violation de la quarantaine.

 

Début 2021, le Blick a fait le palmarès des cantons qui ont le plus réprimé en vertu des lois Covid et il se trouve que le canton de Genève a trois longueurs d'avance par rapport même à Berne, où le bannissement était pratiqué.

 

Je m'adresse à l'Office fédéral de la statistique afin de savoir combien de personnes ont été pénalisées en vertu de la loi Covid en Suisse. Ils m’ont répondu: «On ne sait pas. On peut vous dire qu’en vertu des lois sur les épidémies, trois personnes ont été arrêtées à l'aéroport, mais on n’a pas de statistiques sur la loi Covid». Je m'adresse alors à l'Office genevois cantonal de la statistique, qui «ne s’occupe pas de ça» non plus. Puis à la chancellerie de l'Etat de Genève qui m’invite à consulter son rapport sur la gestion de la crise Covid de 250 pages. Rien sur les amendes ni les infractions pénales. Je m’adresse donc au Ministère public, qui me renvoie également vers son rapport annuel.

 
 

Lorsque l’on cherche via le mot-clé «Covid», il apparaît partout. En particulier parce qu'il semblerait que les employés du Ministère public n'aient pas la peau très dure et que le Covid-19 ait fait des ravages en son sein. Entre l’absentéisme et le reste. Mais toujours aucune entrée sous amende. Je m’adresse donc à la police. Son porte-parole, Monsieur Pierrehumbert, que j'ai finalement au bout du fil, me dit de consulter le rapport annuel. Le mot Covid apparaît à toutes les pages parce qu'ils ont été frappés par ce virus de manière particulièrement violente, semble-t-il. Mais rien sous amende, ni sous arrestation.

 

Je recontacte le porte-parole, Monsieur Pierrehumbert, qui finit par me donner des chiffres extrêmement bas qui ne correspondent pas à ce qui a été publié. A savoir près de 8500 entre 2021 et 2022. Quand je lui téléphone, je lui dis: «Dans votre mail, vous ne parlez pas des emprisonnements. Combien de personnes ont été emprisonnées à Genève pour la violation de la loi Covid. Il me répond, en rigolant et en me prenant pour un âne: «Mais, Monsieur Künzi, on n'a emprisonné personne à Genève en rapport avec la loi Covid!»

 

«Regardez peut-être au fond de vos geôles s'il n’y a pas des prisonniers qui croupissent, lui répondis-je. Parce que, en lisant la presse, j'ai appris que des civilistes ayant fait du commerce de faux pass sanitaire ont été emprisonnés et maintenus en détention pour risque de collusion.»

 

Il m’a rétorqué «Ah oui, vous avez raison, je vais me renseigner» puis n’a jamais répondu à ma question. C’est ce qui manque à mon film: j’aurais aimé pouvoir parler à des gens emprisonnés à cause de cette loi.

 

Comment avez-vous financé ce film? Selon un article du Temps, vous auriez pu bénéficier de 25'000 francs de Cinéforum et de la SSR sur un budget de 300'000 francs?

 

Cela fait un quart de siècle au moins que je fais du cinéma. Une dizaine de mes films sont passés à la télévision. Et quand vous avez un film coproduit par la SSR – ce qui arrive parfois – vous touchez ce qu’on appelle le «succès passage antenne». On vous met dix mille francs, ou quelque chose comme ça, dans une caisse et vous pouvez utiliser cet argent quand vous voulez.

 

Quand ils vous versent l’argent «succès passage antenne», vous êtes obligés de stipuler le soutien sur l'affiche. J'ai pensé qu'il fallait également mettre le logo, comme pour mon dernier film. Tout le monde fait comme ça.

 

Mais là, évidemment, il y a eu des protestations en haut lieu! J’ai reçu un mail il y a quinze jours dans lequel ils m'ont demandé d'ôter le logo. Cela m'ennuie, parce que j'ai imprimé des milliers d’affiches. Je ne vais pas commencer à les découper…

 

La Télévision suisse romande a refusé le film, sans jamais me le dire. Je n'ai jamais eu de réponse formelle de leur part. On m’a reproché de faire un film unilatéral, univoque. Car étant donné qu’Alain Berset et Mauro Poggia n’ont pas voulu me parler, mon film n'est pas neutre. C'est impossible de le mettre dans n'importe quelle case des programmes de la SSR.

 

Mais ils ne m'ont pas dit qu'il fallait ôter le logo avant la sortie du film. Finalement, ce fichu logo m’a nui, parce que des gens ont pensé que j'étais stipendié par la télévision du régime.

 

Qu'est-ce que vous pensez du traitement de la crise Covid par la RTS d’ailleurs?

 

Odieux. Il s’agit plutôt de mauvais traitement. Comme le disait le rédacteur en chef de la NZZ, la SSR est devenue le média du gouvernement. C’est pire que ça! Comme le fait remarquer Jacques Pilet dans mon film, ils poussaient à aller encore plus loin.

 

Je me souviens d’une interview de Berset par la journaliste du JT un dimanche soir. Elle voulait vraiment le pousser à ce qu'il ferme tous les restaurants d'altitude. C'est tout juste si elle ne demandait pas que l'armée intervienne, étant donné qu'il n’y a pas de police fédérale en Appenzell.

 
 

Sans parler des incalculables interventions de Mauro Poggia sur Infrarouge. On voyait toujours les mêmes têtes qui nous criaient qu’on allait tous périr si on n’appliquait pas les ordres du gouvernement.

 

Vous avez toujours été un fervent défenseur des valeurs de gauche. Or, elle a été parmi la première à défendre les mesures sanitaires. Etes-vous toujours un homme de gauche et que pensez-vous de l’attitude de ses représentants pendant la crise?

 

C’est une véritable capitulation, plus qu'une trahison. Heureusement, comme je le mentionne dans mon film, les syndicats genevois tirent leur épingle du jeu au niveau européen en ayant pu faire condamner la Suisse à la Cour européenne des droits de l'homme.


«C'est parce que je suis de gauche que je me suis battu contre ces mesures liberticides»

On a fait grève pendant le Covid, mais on n'osait pas faire de réunions entre grévistes dans l'établissement, ni d’assemblée générale des grévistes qui se tenait d'habitude au Palladium Il y avait l’impossibilité de manifester, de défiler. C’étaient des mesures dignes d'une dictature sanitaire.

 

Mais je reste un homme de gauche. C'est parce que je suis de gauche que je me suis battu contre ces mesures liberticides. Si j'avais été de droite, je serais habitué à des états autoritaires que je saluerais.

 

Pourtant, il semblerait que la contestation, durant cette période, venait plutôt de l’UDC, non?

 

Non, l’UDC ne s'est pas battue, pas du tout. Elle a formulé quelques remarques, mais vous parlez à un type qui a organisé avec mon fils la plupart des manifs qu'il y a eu à Genève. C’étaient des mouvements populaires, il y avait de tout, mais je n’ai jamais vu de contingents de l’UDC.

 

Cependant, on a beaucoup lu dans les médias que la contestation et la résistance étaient menées par des hurluberlus d’extrême droite, à la limite des dérives sectaires. Vous réfutez donc cette image?

 

Bien sûr, il s’agissait de discréditer ces mouvements. Mais j’ai retrouvé des camarades de gauche qui n’ont pas perdu le nord, qui ne se sont pas ralliés à l'union nationale. On a vécu un peu ce qu'on avait vécu – toutes proportions gardées, les analogies sont toujours un peu délicates – lors de la mobilisation suisse. Le Parlement, à l'unanimité, vote les pleins pouvoirs au gouvernement et le parti socialiste accepte. A l’époque, c’était un peu plus carabiné qu'aujourd'hui, vu que c'était la réintroduction de la peine de mort dans les tribunaux militaires; censure systématique de la presse, etc.

 

Vous a-t-on également, vous l’homme historiquement de gauche, qualifié de complotiste d’extrême droite?

 

Pas nommément. Mais évidemment, je faisais partie de ce lot d’antivax, en dépit du fait que j'ai été vacciné, comme tout le monde. Je n’ai hélas pas pu éviter le bouillon Pfizer, mais heureusement, il n'y a pas eu de conséquence connue dans mon organisme.

 

Évidemment, on était tous traités d’imbéciles, d’ascientifiques... le répertoire était riche. J’ai été accusé d’être un eugéniste, un libertarien, etc. Complètement débile! Quand je donnais les statistiques, on me prenait pour un hérétique. Comme si c'était moi qui les fabriquais. Mais ensuite, j'ai été pratiquement exclu de solidaritéS. Je suis allé à l'Union populaire. Parce qu'on a l'extrême gauche la plus bête du monde, comme La Tribune de Genève, l'a pertinemment qualifiée.

 
 

A l’Union populaire, j’ai réclamé un débat. Mais j’ai dû le réclamer haut et fort parce que vous pensez bien qu’on n’allait pas débattre d'une question aussi évidente! Le virus est là, il faut se cacher sous les tables. On était tous séparés de cinq mètres à cette assemblée générale, où j'avais l'impression m'adresser, à des gens qui venaient d'une autre planète, avec une autre forme d'intelligence surtout. J’avais l'impression d'être à une assemblée du PDC.

 

Quand je leur ai expliqué que les pharmas ne fabriquent pas de médicaments pour le bonheur de l'humanité, mais que, comme les marchands d'armes, elles fabriquent n'importe quoi pour faire de l'argent, j’ai été traité comme un fou furieux.

 

C’est une chose d'abandonner le marxisme, c’en est une autre d'abandonner le matérialisme. Nous étions en pleine psychose collective, pour reprendre les termes d'un type que je hais. Mais la réalité, c'est la réalité. Elle n'est ni de gauche, ni de droite.

 
 

Je suis membre fondateur de solidaritéS, je suis aussi le seul député trotskiste que la ville de Genève n'ait jamais connu. J'ai été élu conseiller municipal à la fin du siècle passé. Ce recul intellectuel était stupéfiant! Au moment de la crise H1N1 en 2009, solidaritéS a publié un article qui disait que c’était terrible, qu’il fallait courir acheter du Tamiflu. C’est tout juste s’il n’y avait pas un petit coupon promo en bas de la page. Dans les journaux de solidaritéS, c'est le même qui, d'épidémie en épidémie, est sûr que cette fois, on est foutu.

 

Rencontrez-vous des problèmes pour projeter votre film?

 

C’est le moins que l’on puisse dire! A Genève, je fais toujours mes premières dans les grands cinémas: au Scala, au Bio, au Butler. Cette fois, ils ne m'ont même pas répondu. Il y en a juste un qui m’a dit «il semblerait que votre film n'ait pas les qualités artistiques nécessaires».

 

Donc maintenant, je suis non seulement cinéaste, producteur, réalisateur, monteur, preneur de son et caméraman, mais j'en suis revenu au stade primaire d’il y a 25 ans, quand j'ai fait mon premier film et que j'ai dû louer une salle, puis faire la billetterie, parce qu’aucun cinéma ne voulait le projeter.

 

La première à Genève n’a pas été un succès, mais un triomphe: les 660 places du cinéma Arditi ont toutes été vendues. On a dû fermer la billetterie deux jours avant. Et puis même triomphe à Lausanne, au Casino de Montbenon: 500 personnes! On a dû fermer la billetterie dix jours avant.


«Nous n’avons eu aucune réponse d’aucun cinéma»

 

Maintenant, c'est la course contre la montre. Parce que normalement, quand vous sortez un film, Cinéforum vous accorde un chèque de 12'000 francs pour la promotion. Je remplis donc tous les formulaires nécessaires, comme cela avait été le cas pour moi dernier film. Et croyez-moi que ce n’est pas simple de remplir les formulaires de ces lascars! Puis c’est en lisant Le Temps que j'ai appris que je n'avais pas droit à cette subvention. Je n’avais donc pas un rond pour faire la promotion du film.

 

On a demandé, à trois reprises, à tous les cinémas de projeter le film, étant donné le succès des premières genevoise et lausannoise. Nous n’avons eu aucune réponse d’aucun cinéma.

 

Pour obtenir la prime à la diffusion de Cinéforum et les aides de la Confédération, il faut faire 2000 entrées en une année. Ce sera bientôt fait, mais cela ne me permettra pas de rentrer dans mes frais.

 

L’enveloppe globale pour l’ensemble du cinéma suisse est de 85 millions par année, dont 11 millions pour le cinéma romand. Tout ça pour des films qui font rarement beaucoup plus de 1000 entrées. Ici, nous avons un film que les gens se battent pour voir et personne ne veut le diffuser.

 

Si je comprends bien, c’est parce que le film est unilatéral: Berset et Poggia refusent de s’exprimer, on considère donc que ce film ne donne qu’une seule voix. Est-ce bien ce qu’on lui reproche?

 

Vous croyez que les censeurs vont venir vous expliquer leur raisonnement? Il n’y a aucune explication. Il y a eu deux articles d’une page dans Le Temps et dans Le Nouvelliste. Ce qui en ressort, c’est la question de savoir ce qu’il se serait passé si on n’avait pas pris de mesure. Or, ce n’est pas l’objet du film.

 

Les Français ont enfermé leurs citoyens comme dans des clapiers, sans avoir vaincu l’épidémie pour autant. Si nous n’avions pas pris de mesure, peut-être nous serions-nous retrouvés comme en Suède, avec à peu près autant de morts qu’en Suisse, sans avoir détruit notre société. Ce sont les seuls reproches que l’on m’a formulés. Unilatéral, c’est un comble: comme si Berset et Poggia n’avaient pas déjà été suffisamment entendus…

 

Le type qui vous parle a tout de même réussi à obtenir une interview du ministre de l'Agriculture du Chili il y a plusieurs années. Là-bas c’était possible, mais ici non. Ce qui vous donne une idée du niveau d'ouverture démocratique et de transparence.

 

Ne pensez-vous pas que la participation de personnages «controversés» comme Chloé Frammery ou Astrid Stuckelberger (qui a tout de même affirmé qu'il y avait des hydres dans les vaccins) respectivement en tant qu'assistante de réalisation et lors du débat suivant sa présentation à Lausanne, a pu porter préjudice à l'image du film?

 

Mon film porte sur la répression et, en toile de fond, une épidémie qui a fait trois fois plus de morts que celle de 2015. Les histoires d'antivax, et autres complotistes ne sont pas abordées et je pense ne pas apporter de l'eau au moulin de ces élucubrations. Je n'ai pas réuni des personnes avec lesquelles je suis d'accord sur tout lors des tables rondes, loin de là. Ce qui nous unis, c'est la dénonciation des mesures passées et futures, dangereuses pour la société. Pas des dogmes.

 

«Ce mouvement de Résistance est un mouvement populaire aux opinions parfaitement divergentes»

Je ne savais pas ce qu'était qu'une hydre et je n'ai pas saisi quand Astrid en a parlé. Et je dois dire que, si je ne suis pas en accord avec elle sur certains points que je juge farfelus, j'aurais pu contresigner son texte lorsqu'elle a parlé des libertés fondamentales lors du dernier symposium de Genève. Concernant Chloé, autant vous dire tout de suite que je préfère mettre en exergue ce qui nous unit que ce qui peut nous mettre en sévère désaccord. Ce qui importe dans le cadre de mon film, c'est que nous avons été au coude à coude lors des manifs. Ce mouvement de Résistance est un mouvement populaire aux opinions parfaitement divergentes. Ce n'est pas un parti politique qui aurait une communauté de pensée sur les principales questions: guerre, exploitation, destruction de la planète, etc.

 

Que pensez-vous du silence des autres artistes pendant toute cette période Covid?

 

De la part de gens censés avoir un esprit critique, c’est le plus dramatique. J'ai essayé de secouer un peu le cocotier pour qu'ils manifestent comme en France, où des théâtres ont été occupés ici, ils ont tous été anesthésiés. Probablement gavés par les RHT (indemnités en cas de réduction de l'horaire de travail, ndlr) et autres aides du gouvernement. Visiblement, les artistes suisses n'ont pas un besoin de s'exprimer absolument irrépressible. C’est inouï!

 

J’ai essayé d'en contacter, mais lors des manifs, j'ai bien vu qui était là ou pas. On pourrait faire l’appel: il n’y en avait aucun! Une fois, j’ai vu un représentant de la télévision, mais je pense qu'il était déjà à la retraite.

 

Ne pensez-vous pas que les gens en ont marre d’entendre parler du Covid?

 

Non, la preuve c'est que les gens viennent. Les salles sont pleines.

 

Oui, mais ne s’agit-il pas toujours des mêmes personnes, déjà convaincues par votre thèse?

 

Quand il y a 660 personnes qui viennent, on ne peut pas penser qu’elles ont toutes la même opinion. Il faut quand même avoir quelques espoirs en l'intelligence humaine! Maintenant, on peut faire le bilan. On sait que la moitié des morts était dans les EMS. Le reste étaient des gens avec des comorbidités et surtout qui n’étaient pas soignés! Pas étonnant que la mortalité ne diminue pas si on ne soigne pas les gens. Mais ça, c’est un tabou.

 

Le titre de votre film, Covid: Totalitarisme helvétique?! est une question. Avez-vous la réponse?

 

Cela dépend de ce que l’on entend par totalitarisme. Selon Hannah Arendt, le totalitarisme est la suppression de toutes les libertés.

 

La presse n’a pas été bâillonnée – même si elle racontait la même chose que le gouvernement – il y a tout de même eu des médias alternatifs. Les réseaux sociaux fonctionnaient, tout le monde n’a pas été empêché de s’exprimer. Et puis il n’y a pas eu de peine de mort, ni de personnes gravement mutilées pendant les manifestations. Les emprisonnements sont restés marginaux. Nous étions sur une sale pente qui menait à tout cela, mais heureusement il y a eu un coup de frein.

 

Ce n’est pas pour rien qu'il y a eu tant de manifestations: tous les jeudis, de 30 à 40'000 personnes dans les rues à Berne. Puis les votations sur la loi Covid ne sont pas passées comme une lettre à la poste. Il a fallu une campagne intense du gouvernement et des médias.

 

Tout ça pour dire que c’était une forme de totalitarisme, mais pas sous sa forme chimiquement pure décrite par Hannah Arendt.

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