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Invité de la rédaction

Quand la poste prend nos journaux en Levrat

Dernière mise à jour : 10 août

la region
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Ce billet, signé l'écrivain Quentin Mouron, a initialement été publié sur son blog, Les yeux et la mémoire. Il est reproduit ici avec l'autorisation de son auteur.

Entrer dans une Poste donne toujours un peu envie de mourir. On y devine encore trop l’ombre de ce qu’a pu être un service public. Au milieu des bougies odorantes, des lampes de poche et des romans écrits avec les pieds, on prend la mesure de ce qui, chaque année, a été détruit.


La Poste s’est muée en formidable machine à détruire: les bureaux, les emplois, les services, le pouvoir d’achat et même, maintenant, la presse régionale. On sait que ce n’est pas rose du côté des médias romands, on sait les coupes, les plans de restructuration, les fermetures, les fusions, les tripotages. Mais toute une rédaction décimée d’un seul coup, il fallait le faire! La Poste l’a fait.


Depuis plusieurs mois, elle a placé la pointe de son poignard sur la gorge du journal La Région (Nord Vaudois). Elle lui a fait une proposition digne d’un brigandage: ou bien vous vous acquittez de frais d’envoi exorbitants, augmentés sans aucune vergogne ni sens de la mesure, ou bien vous allez voir ailleurs... Vous pouvez aller voir ailleurs, bien sûr, nous sommes dans un pays libre, mais, dans ce cas, soyez certains que vous perdrez les aides à la presse de la Confédération.


La Région a dû trancher. A-t-il bien fait? Pouvait-il faire autrement? Je n’en sais rien. Toujours est-il qu’il a dû contourner le service public, devenu si peu serviable, si menaçant. La menace a été mise à exécution, le coup a été porté: 14 emplois, un titre de moins dans le paysage médiatique romand, un peu moins de proximité, un peu moins de couverture locale, un peu moins de démocratie aussi, ou bien, pour dire un gros mot, un peu moins de peuple.


On ne peut s’empêcher de penser que, même si La Poste suit les diktats imposés par la Confédération, il y a quand même un homme à sa tête... Il y a dix ans, quand on voulait que les socialistes perdent une élection, c’était facile: il suffisait de braquer sa caméra sur le camarade Levrat, et de l’entendre réciter son chapelet de lieux communs en gémissant, avec cet air ahuri qui permet de s’étonner qu’un même parti ait pu engendrer d’un côté des Maillard, des Sommaruga, des Dreifuss, et de l’autre des Levrat. Toujours est-il que le bonhomme, après une vie passée à faire perdre la gauche, n’allait pas s’arrêter en chemin... Il lui a fallu La Poste! Après tout, l’anarchiste Max Stirner a bien fini marchand de glaces.


Après les défaites, il a fallu la trahison. Il a ainsi été nommé, sur fond de soupçons de copinage, président du Conseil d’Administration de La Poste. Et que fait-il, à la tête de ce conseil? Il défend ardemment les «réformes», c’est-à-dire le massacre. Il saute d’une radio à l’autre, défenseur zélé de l’agenda néo-libéral qui condamne d’un même geste le service public et la presse régionale. Il continue à geindre, mais cette fois-ci avec cette espèce de panache en stuc que confèrent les fausses gloires, si proches de la capitulation.

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