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Il faut (encore) sauver le soldat Berset

Dernière mise à jour : 20 nov. 2023

Une fois n’est pas coutume, la couverture médiatique du nouveau scandale impliquant Alain Berset (on ne les compte plus) a été plutôt légère en Suisse romande. L’indulgence médiatique et politique vis-à-vis du président sur le départ est pour le moins étonnante… ou alors pas vraiment.

Alain Berset
© Flickr
 

D’où parle-t-on? Depuis 2020, L’Impertinent renouvelle régulièrement ses demandes d’interview d’Alain Berset, sans succès. Ce qui n’est pas sans susciter un certain agacement.

 

«La popularité du président de la Confédération Alain Berset est peu affectée par la révélation d’éventuelles Corona-Leaks» écrivait Arcinfo en janvier. Depuis, ces Leaks ne sont plus «éventuelles», mais la popularité du président reste extrêmement élevée, malgré ses casseroles. Et peut dire qu’elles sont nombreuses et surtout inhabituelles pour une personnalité de sa position.


Entre sa gestion pour le moins contrastée du Covid, entachée de mensonges éhontés, ses escapades dans les airs et ses affaires de maîtresse chanteuse, il y avait de quoi écorner cette si brillante réputation. Il faut dire qu’à chaque fois, le chef du Département fédéral de l’Intérieur a été blanchi, comme par magie. Parce qu’une chose est claire désormais: Alain, c’est jamais de sa faute.

 

(Re)lire notre article: Il faut sauver le soldat Berset

 

Encore une fois, alors que son responsable de la communication est suspecté d’avoir rencardé plusieurs journalistes pendant la crise Covid – 38 séances du Conseil fédéral sur 50 ont fuité dans la presse – le président est globalement épargné par le constat de la Commission de gestion parlementaire chargée d’enquêter sur l’affaire.


«Il s’est montré naïf, léger»; «Il n’a pas fait le nécessaire pour empêcher les fuites»; «Rien n’implique directement le Conseiller fédéral»; «Il n’a pas menti à ses collègues»… C’est le genre de constat que l’on peut lire dans la presse, depuis vendredi, jour de l’annonce des conclusions.


La palme de l'autruche revient à l'un des correspondants au Palais fédéral pour Le Temps, qui agite le drapeau du «circulez, y a rien à voir!» comme nul autre:



Selon le président du groupe de travail parlementaire, Alain Berset était au courant des contacts réguliers entre son chef de la communication et le patron de Ringier, mais on ne sait pas s’il avait connaissance du contenu de ces échanges. Parce que nous sommes des lapins de six semaines.


Dans sa newsletter mensuelle, le site Loitransparence.ch écrit samedi matin: «Dans l’affaire des e-mails du conseiller fédéral Alain Berset, la Commission de gestion du Conseil des Etats (CdG-E) a mis le doigt sur des lacunes dans le traitement des documents officiels. (…)

Après avoir appris que des e-mails importants avaient été effacés au sein du Département de l’intérieur (DFI) d’Alain Berset, la CdG-E a enquêté sur le cas. Le rapport évoque des lacunes flagrantes dans le classement et l’archivage des documents de l'administration fédérale. Par exemple, le délai de conservation des données électroniques serait trop court. Il ressort également que le DFI a refusé de fournir des documents au préposé fédéral dans le cadre d'une procédure de médiation: il s’agit d’une violation claire de l’obligation de collaborer. Une situation «insatisfaisante» pour la commission.»


Parce que oui, dans le cadre d’une enquête parlementaire, on décide de ce qu’on a envie de dire ou pas. Et si ces carences problématiques influent sur le résultat, elles sont largement minimisées dans la presse Welche.


Le Blick romand – porté par un rédacteur en chef dont les «standards journalistiques» ne sont pourtant plus à démontrer – s’est contenté de reprendre la dépêche ATS. Habituellement si prompte à étaler au grand jour les scandales d’Etat les plus déterminants pour l’avenir du pays, la rédaction n’a apparemment pas jugé utile d’enquêter sur l’affaire et s’est contentée du minimum syndical dans sa couverture.


Pourtant, le Blick aurait largement profité des fuites de ces informations par le biais de Marc Walder, le patron de Ringier. Ce dernier, qui s’était trahi en révélant avoir donné pour consigne à ses rédactions d’aller dans le sens du gouvernement pendant la crise, a démenti avoir utilisé ces fuites orchestrées pour alimenter le Blick en informations exclusives. Le Monsieur aimerait que l’on croie qu’il aurait gardé tout cela pour son journal intime.


Mais malgré ces éléments, pas d’aveu, pas d’introspection, pas d’enquête interne.

 
 

Rien non plus dans les autres titres concernés par l’enquête, qui auraient également profité de ces fuites. Ils se contentent de relayer l’information, mais n’évoquent pas leur implication dans l’affaire. En tant qu’acteurs de l’événement, ils sont pourtant bien placés pour sortir du scoop. Mais non.


On aurait aimé que les médias qui ont profité de ces fuites nous expliquent comment cela s’était déroulé. Qu’ils acceptent d’admettre les faits et qu’ils nous livrent les coulisses de cette affaire, dont ils sont les principaux acteurs.


Quant à watson, qui s’exprime sous la plume de l’habituellement plus fin Antoine Menusier, on se doute que Berset était au courant de tout, écrit-il dans un billet datant de janvier, mais qu’il y ait eu fuites ou pas, ce n’est pas grave car il fallait conserver l’union nationale en cette période de troubles où les méchants complotistes menaçaient à tout moment de propager l’indocilité dans les rangs.


Voilà où on en est.


Les journalistes sont-ils capables d’enquêter sur leurs propres déviances? A vous de juger.

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