Amèle Debey

7 sept. 20227 Min

Vaccin Covid: «Augmentation du risque d'événements indésirables graves», selon des chercheurs

Mis à jour : 8 sept. 2022

Tandis que les entreprises pharmaceutiques font valider leurs nouvelles formules de boosters par les agences de santé à travers le monde, on en sait toujours aussi peu sur les vaccins Covid à ARNm. Une équipe de chercheurs inquiète de ses dernières trouvailles en matière d’effets secondaires tire la sonnette d’alarme et exige des réponses.

© DR

Si le certificat Covid n’est plus nécessaire en Suisse depuis le début de l’année 2022, il n’a pas perdu de son utilité dans certaines régions de la planète. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’OFSP a prévu une mise à jour de son application, qui s’avérera particulièrement utile pour les voyageurs.

En effet, comme nous l’apprend le site du Routard, voici où nous en sommes actuellement, point de vue vaccination :

Pays fermés aux touristes non vaccinés

D’ailleurs, les agences de santé préviennent que le certificat pourrait faire son retour en Europe, si la situation sanitaire venait à s’aggraver. Le vaccin a donc de beaux jours devant lui.

Pourtant, on en sait encore très peu sur cette substance, certainement parmi les plus inoculées à l’être humain dans l’histoire. Et si l’utilisation que l’on en fait est inversement proportionnelle à nos connaissances la concernant, il y a des raisons à cela.

Précipitation

Comme le révélait le prestigieux journal Time il y a quelques semaines, le booster destiné à nous protéger contre les variants d’Omicron a été approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) et le Center for Disease Control and Prevention (CDC) avant même qu’il n’ait été testé sur l’être humain. Et ce pour une question de temps.

Ce qui divise au sein même du comité consultatif de la FDA. Le docteur Paul Offit, qui en fait partie, a notamment affirmé que cette stratégie le mettait mal à l’aise: «Il note que les données présentées par Pfizer-BioNTech et Moderna en juin concernant leur injection de rappel BA.1, qui portaient sur les niveaux d'anticorps antivirus générés par le vaccin, étaient peu encourageantes, peut-on lire dans l’article.

Et le docteur de témoigner: «Ils ont montré que les titres d'anticorps neutralisants étaient entre 1,5 et 2 fois plus élevés contre Omicron que les niveaux induits par un rappel du vaccin ancestral. J'aimerais voir des preuves claires d'une augmentation spectaculaire des anticorps neutralisants, plus spectaculaire que ce que nous avons vu contre le BA.1, avant de lancer un nouveau produit. On nous doit au moins ça.»

En Suisse aussi, de nouveaux boosters ciblés sur Omicron ont été approuvés. Mais la stratégie ne serait pas la même, comme nous l’explique Swissmedic:

«Cet article (celui de Time, ndlr) concerne le booster Moderna avec les variantes Omicron BA.4 / BA.5, qui a été autorisé par la FDA. Il ne s'agit pas du même booster que celui autorisé par Swissmedic (variante Omicron BA.1). Jusqu'à présent, aucune demande d'autorisation n'a été déposée auprès de Swissmedic pour des produits dont l'efficacité et la sécurité n'ont pas été étudiées chez l'homme ou dont les dossiers n'ont pas été expertisés par Swissmedic.»

Inquiétude et demande de réponses

Cependant, et malgré ce que soutient Swissmedic, le vaccin Covid à ARNm de Pfizer et Moderna a été approuvé sans que toutes les données sur les protocoles des essais cliniques n’aient été analysées. Tout simplement parce que ces entreprises refusent de communiquer les données en question. C’est donc également le cas pour les boosters, qui sont des dérivés du vaccin de base.

Plusieurs chercheurs issus de facultés internationales se sont penchés sur les données communiquées par les entreprises pharmaceutiques, afin notamment de tirer des conclusions sur les effets secondaires des vaccins Covid. Le 31 août dernier, ils ont publié les résultats de leurs recherches dans une revue à comité de lecture.

Face au manque de réaction des deux principales pharmas impliquées, ces chercheurs ont rédigé une lettre ouverte publiée par le British Medical Journal, dans laquelle ils somment les dirigeants de fournir toutes les données sur les vaccins. Ils en profitent également pour dire leur inquiétude face à l’augmentation constatée du risque d’événements indésirables.

«Aujourd'hui (31 août), notre étude sur les événements indésirables graves dans les essais de phase 3 du vaccin covid-19 de Pfizer et Moderna a été publiée dans la revue à comité de lecture Vaccine. Les résultats ont montré que Pfizer et Moderna ont tous deux présenté une augmentation du risque absolu d'événements indésirables graves d'intérêt particulier (combinés, 1 pour 800 vaccinés), ce qui soulève des inquiétudes quant au fait que les vaccins à ARNm sont associés à plus de dommages que ceux initialement estimés au moment de l'autorisation d'urgence, écrivent-ils.

Les vaccins Covid-19 font désormais partie des médicaments les plus largement diffusés dans l'histoire du monde. Pourtant, les résultats des essais cliniques pivots ne peuvent être vérifiés par des analystes indépendants. Le public a un droit légitime à une analyse impartiale de ces données.»


Voici la traduction complète de la lettre ouverte, avec ses signataires:

En tant que co-auteurs d'une récente étude sur la sécurité des vaccins à ARNm covid-19 qui demandait la transparence totale des données des essais cliniques du vaccin covid-19, nous souhaitons partager cette lettre ouverte aux PDG de Pfizer et Moderna.

Chers Albert Bourla et Stéphane Bancel,

Au cours de l'été 2020, avant que les résultats des essais ne soient annoncés, les fabricants de vaccins ont été critiqués pour avoir gardé secrets les protocoles des essais[1].

À notre connaissance, les organismes de réglementation tels que l'Agence européenne des médicaments, la MHRA du Royaume-Uni et Santé Canada ne disposent pas d'ensembles de données électroniques sur les participants individuels (DPI)[4]. Comme nous le verrons plus loin, ces données peuvent répondre à des questions persistantes sur ce que les essais ont indiqué concernant l'équilibre entre les avantages et les inconvénients en décembre 2020, questions auxquelles il est difficile de répondre avec ce qui a été rendu public. L'effort pour préparer ces ensembles de données est minime, et aucune donnée potentiellement identifiante n'est nécessaire. Nous ajoutons donc nos noms à l'appel lancé à Pfizer et Moderna pour qu'ils publient ces données[5].

Aujourd'hui (31 août), notre étude sur les événements indésirables graves dans les essais de phase 3 du vaccin covid-19 de Pfizer et Moderna a été publiée dans la revue à comité de lecture Vaccine[6]. Les résultats ont montré que Pfizer et Moderna ont tous deux présenté une augmentation du risque absolu d'événements indésirables graves d'intérêt particulier (combinés, 1 pour 800 vaccinés), ce qui soulève des inquiétudes quant au fait que les vaccins à ARNm sont associés à plus de dommages que ceux initialement estimés au moment de l'autorisation d'urgence.

Nous reconnaissons que nos estimations ne sont que des approximations car les données originales restent séquestrées. Par exemple, nous n'avons pas pu stratifier par âge, ce qui aiderait à clarifier les populations dans lesquelles les avantages l'emportent sur les inconvénients.

Pour déterminer de manière plus définitive les avantages et les inconvénients réels, il faut disposer de données sur les participants individuels (IPD) qui ne sont toujours pas accessibles aux chercheurs. Contrairement à son homologue européen, la FDA, l'organisme de réglementation américain, détient des ensembles de données électroniques sur les IPD et, lors d'une réunion pour discuter de notre étude en mars dernier, nous avons demandé qu'elle répète notre analyse en utilisant les IPD, mais à notre connaissance, cela n'a pas eu lieu. Avec la publication de notre étude, nous avons écrit à nouveau à la FDA pour réitérer notre demande.

Plus précisément, pour permettre l'évaluation des éléments préoccupants, pour chaque hospitalisation et EIG (y compris les séquelles de covid-19 et de covid-19), nous avons besoin : d'un numéro d'identification unique du participant, de détails démographiques (âge du participant, sexe, etc.), du type d'EIG, de certaines dates (inscription, administration des doses 1 et 2, date de l'EIG ou de l'hospitalisation), et de savoir si le participant était inclus ou non dans le sous-groupe " sécurité FDA " (participants avec un suivi médian ≥ 2 mois après la dose 2). Les données susmentionnées doivent être extraites de l'ensemble de données au moment qui a justifié l'autorisation d'utilisation en urgence (date limite des données le 14 novembre 2020 pour Pfizer, le 25 novembre 2020 pour Moderna). Pour permettre une analyse plus approfondie, les fabricants doivent également fournir des ensembles de données contenant les informations ci-dessus au moment de l'autorisation ultérieure des vaccins (BLA).

Les vaccins Covid-19 font désormais partie des médicaments les plus largement diffusés dans l'histoire du monde. Pourtant, les résultats des essais cliniques pivots ne peuvent être vérifiés par des analystes indépendants. Le public a un droit légitime à une analyse impartiale de ces données. Les vaccinations COVID ont coûté aux contribuables des dizaines de milliards de dollars, rivalisant peut-être même avec le budget annuel des NIH pour tous les aspects de la recherche biomédicale et comportementale.

La transparence, la reproductibilité et la réplication sont les pierres angulaires d'une science de qualité. Il est grand temps que Pfizer et Moderna permettent à des scientifiques et des médecins indépendants de consulter les données originales et de reproduire les analyses. Ces petits ensembles de données peuvent aider à répondre à des questions très importantes et à dissiper les inquiétudes largement répandues quant au manque de transparence.

Joseph Fraiman, MD
 
Thibodaux Regional Health System, Thibodaux, LA, U.S.A.

Juan Erviti, PharmD, PhD
 
Unit of Innovation and Organization, Navarre Health Service, Spain

Mark Jones, PhD
 
Institute of Evidence-Based Healthcare, Bond University, Gold Coast, QLD, Australia

Sander Greenland, MA, MS, DrPH
 
Fielding School of Public Health and College of Letters and Science, University of California, Los Angeles, CA, U.S.A.

Patrick Whelan, MD PhD
 
Geffen School of Medicine, University of California, Los Angeles, CA, U.S.A.

Robert M. Kaplan, PhD
 
Clinical Excellence Research Center, School of Medicine, Stanford University, CA, U.S.A.

Peter Doshi, PhD
 
University of Maryland School of Pharmacy, Baltimore, MD, U.S.A.


References

1. Thomas K. Vaccine Makers Keep Safety Details Quiet, Alarming Scientists. The New York Times [Internet]. 2020 Sep 13 [cited 2020 Oct 5]; Available from: https://www.nytimes.com/2020/09/13/science/coronavirus-vaccine-trials.html

2. Grady D, Thomas K. Moderna and Pfizer Reveal Secret Blueprints for Coronavirus Vaccine Trials. The New York Times [Internet]. 2020 Sep 17 [cited 2022 Aug 21]; Available from: https://www.nytimes.com/2020/09/17/health/covid-moderna-vaccine.html

3. Grady D, Wu KJ, LaFraniere S. AstraZeneca, Under Fire for Vaccine Safety, Releases Trial Blueprints. The New York Times [Internet]. 2020 Sep 19 [cited 2022 Aug 21]; Available from: https://www.nytimes.com/2020/09/19/health/astrazeneca-vaccine-safety-blu...

4. Demasi M. From FDA to MHRA: are drug regulators for hire? BMJ [Internet]. 2022 Jun 29;377:o1538. Available from: http://dx.doi.org/10.1136/bmj.o1538

5. Doshi P, Godlee F, Abbasi K. Covid-19 vaccines and treatments: we must have raw data, now. BMJ [Internet]. 2022 Jan 19;376:o102. Available from: http://dx.doi.org/10.1136/bmj.o102

6. Fraiman J, Erviti J, Jones M, Greenland S, Whelan P, Kaplan RM, Doshi P. Serious Adverse Events of Special Interest Following mRNA COVID-19 Vaccination in Randomized Trials in Adults. Vaccine. 2022 August 31. https://doi.org/10.1016/j.vaccine.2022.08.036

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